Démarche radiologique devant des situations cliniques concrètes (prescription et stratégie)

Devant un tableau clinique fébrile
évoquant une pneumopathie infectieuse

Un patient fébrile, avec toux et expectoration, doit avoir une RT. Celle-ci pourra asseoir le diagnostic, aider à guider le probabilisme thérapeutique puis à suivre l’évolution.
La pneumonie franche lobaire aiguë (PFLA) est facile à reconnaître avec son opacité alvéolaire segmentaire ou lobaire à bords dégradés, mais avec arrêt net sur scissure et avec, (parfois), bronchogrammes aériques. On pensera au pneumocoque, mais toutes les PFLA ne sont pas à pneumocoque (légionelles, autres...) et, à l’inverse, tous les pneumocoques ne font pas des PFLA (fig 15).

Quand on constate plusieurs foyers alvéolaires segmentaires distincts, on évoque une bronchopneumonie dont l’acte de naissance est dans la bronchiole et non pas dans les alvéoles comme pour la pneumonie. Elle peut être à staphylocoque (ou autres) et peut ultérieurement confluer en un foyer dominant. Il faut se souvenir que la tuberculose est, au départ, une bronchiolite avec bronchopneumonie intralobulaire périphérique, et que ses « infiltrats » sont habituellement apicodorsaux. La TDM-HR pourra être utile dans les cas débutants ou douteux actuels de tuberculose (migrants, sida...), en montrant l’aspect « d’arbre en fleurs » et de « verre dépoli » qui précède la caverne. Une pneumopathie rapidement excavée peut être due à des bacilles à Gram négatif (klebsielles et autres) ou encore aux nocardias sur un terrain légèrement débilité. Là encore, la TDM peut être utile pour percevoir la nécrose avant la RT.
Les pneumonies atypiques, virales ou à germes apparentés, ont une présentation plus diffuse et interstitielle, sans véritable foyer au début. Le tableau IV différencie les diverses pneumopathies, au plan radioclinique, et le tableau V tente une approche radiobactériologique encore très aléatoire.
Dans les atteintes hématogènes, les foyers sont petits, ronds, périphériques sous-pleuraux et ont tendance à s’excaver vite. C’est le cas des staphylococcies (fig 15) (venant de foyers périnéphrétiques ou autres), ou des valvulopathies infectieuses emboliques (chez le valvulaire ou le drogué intraveineux par exemple).
Chez le sujet HIV positif, une « bronchite » qui dure doit faire rechercher une pneumocystose pulmonaire avec ses opacités floconneuses diffuses, en « verre dépoli ». Il faut savoir qu’au début la pneumocystose peut avoir une RT d’apparence normale alors que la TDM peut déjà percevoir un état de « verre dépoli ». De nombreux germes opportunistes peuvent concerner le poumon du sida, en dehors du Pneumocystis, ainsi que des germes banals non-opportunistes, qui donnent des lésions plutôt en foyers. Il convient de corréler le cliché radiologique au statut immunitaire (charge virale, CD4).
Signalons, pour terminer, une affection rare mais à connaître, qui crée un état pseudogrippal avec des foyers de bronchopneumonie qui ont la particularité d’être migrateurs et non sensibles aux antibiotiques,
alors qu’ils sont très corticosensibles. Il s’agit de la bronchiolite oblitérante avec organisation pneumonique (BOOP) décrite par Epler en 1985, mieux nommée pneumonie organisée cryptogénique
(POC).
Quant au contrôle évolutif sous traitement d’une pneumonie, il faut répéter ici qu’il doit être clinique avant tout et qu’il n’est pas utile de réaliser un cliché de contrôle avant 15 jours.



Devant une toux chronique de l’adulte

La toux est un motif fréquent de consultation de médecine générale. Elle est dite chronique lorsqu’elle persiste plus de 2 à 3 mois. Quatre causes sont responsables de la majorité des cas :
– jetage postérieur dû à une rhinite ou une rhinosinusite chronique ;
– bronchite chronique ;
– asthme ;
– reflux gastro-oesophagien
L’interrogatoire, l’examen physique, le cliché thoracique et un bilan biologique simple permettent, dans la grande majorité des cas, d’identifier une cause, et de proposer un traitement étiologique efficace. Plus rarement, la toux est isolée et persiste malgré des traitements d’épreuve. D’autres examens sont nécessaires, dont le choix est guidé par le terrain, les caractères sémiologiques de la toux et la fréquence des étiologies :
– radiographies des sinus ;
– TDM thoracique ;
– exploration fonctionnelle respiratoire ;
РpHm̩trie oesophagienne ;
Р̩chocardiographie ;
– fibroscopie bronchique.
Plusieurs causes de toux peuvent être associées chez le même sujet.


Quel est l’intérêt du cliché thoracique devant
une toux chronique ?

La RT doit être systématique devant une toux persistante car elle peut découvrir des nodules et/ou des infiltrats (parfois excavés) des apex pulmonaires, évocateurs d’une tuberculose. Un cancer bronchique, des dilatations des bronches, une fibrose pulmonaire peuvent être également révélés.
Plus fréquemment, la radiographie objective une cardiomégalie (index supérieur à 50 %) et des images de poumon cardiaque :
– redistribution vasculaire vers les sommets avec gros hile ;
– comblement des culs-de-sac pleuraux ;
Р̩paississement des scissures ;
Рopacit̩s lin̩aires sous-pleurales aux bases, de type lignes de Kerley.
Quand la RT est normale, une cause non respiratoire ou non radiovisible doit être recherchée, en se basant sur la sémiologie clinique et la fréquence des étiologies.

Quelles sont les causes de toux chronique avec
cliché thoracique normal ? 
 

Le tableau VI tente de répondre à cette interrogation.

Chez l’enfant 

Un tableau fébrile saisonnier peut être dû aux bronchopneumonies banales, le plus souvent virales, puis surinfectées. Devant la répétition des épisodes, il peut être utile de vérifier les sinus, en se rappelant qu’avant 7 ans, il est habituel que les sinus frontaux ne soient pas « creusés ». Le cliché du cavum, souvent demandé, ne s’avère pas d’une grande rentabilité. Une pneumopathie récidivante dans le même territoire doit faire suspecter une cause congénitale sous-jacente : atrésie bronchique, séquestration, kyste bronchogénique/bronchoconstrictif... 
Si le syndrome de pénétration n’est pas retrouvé à l’interrogatoire (enfant-parents), il peut être difficile d’affirmer l’inhalation d’un corps étranger (fragment de jouet, capuchon de stylo à bille, cacahouète...). Le cliché en expiration pourra montrer le siège de l’obstacle en désignant une zone de trappage aérique restant hyperclaire car ne se « vidant » pas.
Enfin, chez le tout petit (en crèche ou non) on se méfiera des bronchiolites dont la RT est souvent trompeuse car d’apparence normale. Il faudra chercher la moindre distension avec hyperclarté. Les conséquences à court et à long termes, peuvent être catastrophiques : destructions parenchymateuses, petit poumon clair type Mac Leod... 

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