Méthode de lecture

La lecture commence donc par l’appréciation de la qualité et on commence par ne pas regarder le poumon (fig 2).
On balaiera l’image d’une façon concentrique du contenant (parois et diaphragme) au contenu (médiastin et poumons). On se forcera à ne regarder et lire le poumon qu’en dernier, pour être sûr de ne pas avoir négligé la « cage », avant de se précipiter sur l’oiseau.
En premier lieu, il faut s’attacher à l’étude de la « cage » thoracique : clavicules, omoplates, rachis et surtout gril costal.
Il faut compter les côtes, et les suivre du doigt, d’arrière en avant (se rappeler que le décalage entre les arcs postérieurs et antérieurs s’accroît progressivement de haut en bas). Pour la recherche de fractures ou de lyses costales, on aura intérêt à « dépolariser » l’image en renversant le cliché. Il ne faut pas oublier que le cartilage sternocostal est peu radio-opaque en haute tension, et que le bord inférieur des arcs postérieurs des côtes de 6 à 10 paraît normalement interrompu ou encoché en son milieu, du fait de la gouttière costale inférieure (attention aux fausses fractures).
Il faut s’assurer de la forme et de la position des deux hémidiaphragmes, le droit étant le plus souvent plus haut mais pas toujours (85% des sujets). On vérifiera la présence de la poche à air gastrique sous l’hémidiaphragme gauche.
En un deuxième temps, on s’intéressera au contenu central (coeur et médiastin) et toujours pas aux poumons.
Le bord droit de la silhouette cardiomédiastinale est constitué de haut en bas par : le tronc brachiocéphalique veineux et la veine cave supérieure, avec le bouton de la veine azygos (loge de Barety), puis par l’oreillette droite et la veine cave inférieure.
Le bord gauche est constitué par : l’artère sous-clavière, le bouton aortique, la fenêtre aortopulmonaire, l’infidibulum pulmonaire et le ventricule gauche.
On déterminera l’index cardiaque : diamètre transversal du coeur sur diamètre transversal du thorax, qui doit être inférieur à 50%.

On appréciera la forme, la taille, la densité et la symétrie des deux hiles pulmonaires. Ces hiles sont essentiellement de structure vasculaire et répondent aux branches de division de l’artère pulmonaire. À droite, le hile a la forme d’une aile d’oiseau, avec un angle aigu dont la bissectrice est la petite scissure. À gauche, la forme est celle d’une crosse faite par l’artère pulmonaire gauche, qui enjambe la bronche principale gauche.
De ce fait, le hile gauche est plus haut situé que le droit. La différence des deux hiles est due à la division inégale des deux branches de l’artère pulmonaire : la division est intramédiastinale à droite, intrapulmonaire à gauche.
Ce n’est qu’en un troisième temps qu’on analysera les deux plages pulmonaires : apex, bases et régions périhilaires. Aux bases, on s’assurera que les culs-de-sac pleuraux sont ouverts et pointus. Aux apex et aux bases, on vérifiera que la vascularisation est harmonieuse de type 0,5/L, c’est-à-dire que les vaisseaux sont plus gros aux bases. La vascularisation doit être symétrique et visible jusqu’à 15mm de la paroi. En périhilaire, on notera les images bronchiques et artérielles dites en « jumelles ». L’« oeil » vasculaire est plein, alors que
 
l’« oeil » bronchique est clair. Les deux yeux sont normalement de même taille (fig 3).
On cherchera à localiser les scissures, dont la visibilité est variable : la petite scissure droite est transversale, en position hémithoracique, plus souvent en coupole qu’horizontale ; les grandes scissures sont obliques de haut en bas et de dedans en dehors. Leur relief est hélicoïdal, ceci expliquant qu’elles ne sont pas visibles sur toute leur hauteur et qu’un nodule latérocardiaque droit puisse être aussi bien en lobaire moyen qu’en lobaire inférieur.
On terminera la lecture du cliché comme on l’a commencé, c’est-à-dire par une vision d’ensemble, avec recul :
– recherche de la présence symétrique des seins chez la femme, de la projection bilatérale et symétrique des mamelons chez l’homme ;
– élimination des éléments extrathoraciques comme les muscles (sternocléïdomastoïdiens au-dessus de la clavicule, pectoraux ou grands dorsaux dans la région axillaire), natte, boutons, chaîne ou médaille, repli cutané ou vestimentaire, anomalies cutanées (tumeur de la peau ou du sein), sans oublier les taches sur les clichés (révélateur,
anomalie de la cassette, etc).
Au total : au risque d’insister lourdement, disons à nouveau qu’il s’agit d’une radiographie thoracique (RT) et non pas d’une radiographie pulmonaire (RP), et qu’il faut lire le poumon en dernier, ne serait-ce que pour ne pas succomber au « syndrome du bikini ». Nous appelons « syndrome du bikini », le syndrome de celui qui ne regarde que les deux plages pulmonaires sur une RT, comme il ne regarderait que le bikini sur une plage... Cette méthode de lecture globalisante et concentrique, permet d’aborder une RT faite sans orientation clinique (RT systématique). À ce sujet, disons que même quand on a une orientation clinique, il faut tout regarder et ne pas vouloir voir que ce que l’on attend d’après la clinique. Cette façon de faire est réductrice... mais malheureusement répandue.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire